De nombreux abus dans la pratique des stages en entreprise ont été mis en évidence. Pour FO-Cadres et pour le Syndicat général des journalistes FO, rendre visibles les stagiaires est la meilleure manière d'éviter la précarisation et le dévoiement de stages. Cela suppose la création d'un véritable statut juridique. C'est pour cet objectif que nous avons formulé plusieurs propositions au sein du comité de suivi des stages.
En faveur d’un statut juridique Nos revendications
Un constat nécessaire Il n’existe aucun recensement précis du nombre d’étudiants effectuant chaque année un stage en entreprise. Toutefois, le Conseil économique et social estime que près d’un étudiant sur deux, soit environ 800 000, effectue au moins un stage au cours de leur scolarité.
Selon l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), ce sont 90 % des diplômés de niveau bac + 4 et plus qui effectuent au moins un stage au cours de leurs études, 50 % en ont même effectué trois ou plus. Le stage, qu’il soit effectué dans une entreprise, une administration ou une association, constitue un utile complément à la formation théorique dispensée dans les établissements d’enseignement supérieur, dans la mesure où il permet aux étudiants de découvrir les réalités du monde du travail et d’acquérir une expérience pratique favorisant leur insertion professionnelle à venir.
Mais de nombreux abus dans la pratique des stages en entreprise ont été mis en évidence, si bien que le stage est totalement détourné de son objectif pédagogique initial. Prisma Presse est aussi concerné par ces dérives... Le stage n’est ainsi plus un élément de la formation des étudiants, mais devient un véritable outil de flexibilité à la disposition des employeurs avec des contraintes minimales et grâce auquel l’employeur peut disposer aisément d’une main-d'oeuvre qualifiée, nombreuse, toujours disponible et peu chère.
Ainsi, les entreprises et c'est ausi le cas dans des rédactions utilisent abusivement la convention de stage avec la complicité de certaines écoles notamment Sciences Po Paris, master journalisme, elles font occuper de véritables emplois à des stagiaires voire emploi des étudiants diplômés par exemple en journalisme au lieu de favoriser l'insertion de ces jeunes en CDI ou en CDD. Plus grave, des stagiaires se succèdent parfois indéfiniment sur même poste, remplaçant ainsi un salarié permanent.
Bien évidemment, les stagiaires – étudiants comme jeunes diplômés - sont des victimes de cette situation abusive de la pratique des stages. En effet dans un contexte de chômage de masse (près de 25 % des jeunes actifs sont touchés par le chômage – INSEE 2005), les jeunes diplômés se réinscrivent administrativement dans les établissements d’enseignement supérieur pour obtenir une convention de stage et se résignent à travailler gratuitement plutôt que de renoncer à leur insertion dans un secteur dans lequel ils souhaitent travailler. On peut ajouter que les abus qui ont construit une nouvelle forme de travail résultent inévitablement du caractère très lacunaire de la réglementation en la matière et témoigne d’une difficile prise en considération des stagiaires.
Pour FO, rendre visibles les stagiaires est sans nul doute la meilleure manière d’éviter la précarisation et le dévoiement de stages. Cette visibilité suppose la création d’un véritable statut. C’est dans cet esprit et pour cet objectif que nous avons formulé plusieurs propositions au sein du comité de suivi des stages. Car pour notre organisation syndicale, bien que les stagiaires nsoient pas des salariés, ils ne doivent plus rester des sans droits.
Proposition 1 : L’inscription dans le Code du travail et le code de l’éducation Les dispositions relatives aux stages doivent être insérées dans le Code du travail et le code de l’éducation, afin de tenir compte à la fois du statut étudiant des stagiaires et de leur présence effective dans l’entreprise, même si elle n’est que temporaire.
Proposition 2 : L’engagement des parties Le président de l’Université ou le directeur de l’établissement d’enseignement supérieur signe au nom de son établissement la convention de stage. Il s’engage à respecter les clauses qui concernent l’établissement d’enseignement supérieur et doit mettre en oeuvre tous les moyens organisationnels et matériels nécessaires, avec l’appui du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Le représentant légal de l’institution d’accueil signe au nom et pour le compte de sa structure la convention de stage. Il s’engage à respecter les clauses qui concernent sa structure et doit mettre en oeuvre tous les moyens organisationnels et matériels nécessaires. Il doit notamment s’assurer que les conditions de travail, les règles d’hygiène et de sécurité sont de nature à préserver l’intégrité physique et morale du stagiaire et à lui garantir que les tâches confiées correspondent à l’objectif pédagogique de son cursus universitaire. L’institution d’accueil se définit comme toute structure juridique accueillant des stagiair(entreprise publique ou privée, établissement public, association, fondation, les fonctions publiques…). Proposition 3 : La définition du stage Est considéré comme stage celui accompli exclusivement dans le cadre du cursus universitaire de l’étudiant, que le stage soit obligatoire ou optionnel, et ceci, dans l’objectif pédagogique d’acquérir une expérience pratique et la familiarisation avec la vie professionnelle. FO demande que les « stages hors cursus » soient purement et simplement interdits. Ces derniers ne correspondent en aucune façon à l’objectif pédagogique inhérent aux stages en entreprise. En conséquence et pour qu’il n’existe plus d’ambiguïté sur ce point, nous avons demandé au sein du comité STAPRO que le gouvernement modifie l’alinéa 1 de l’article 9 de la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances.
Proposition 4 : La recherche et le suivi du stage Avant toute conclusion d’une convention de stage, l’étudiant doit pouvoir obtenir une aide d’accompagnement tant dans la définition de son projet, le choix du stage que dans le suivi même du stage. L’accompagnement de projet ou de choix doit être assuré par le bureau d’aide à l’insertion professionnelle des étudiants. Dans le respect des dispositions de l’article L611-5 du code de l’éducation, ce bureau doit être rapidement mis en place dans chaque université. L’accompagnement de suivi doit être également assuré par un représentant désigné par l'établissement d’enseignement supérieur comme référent pédagogique. Cet accompagnement consistera notamment en des rencontres d’étapes avec l’étudiant sa demande, pour permettre une bonne conduite du stage et en une évaluation finale du stage en collaboration avec le responsable du stage dans l’entreprise.
Proposition 5 : Rôle et attributions des bureaux d’aide à l’insertion professionnelle des étudiants Chaque bureau d’aide à l’insertion professionnelle des étudiants, déjà chargé de diffuser les offres de stages, pourra émettre des observations sur certaines offres de stages.
Proposition 6 : Le suivi du stagiaire dans l’institution d’accueil Une fois la convention de stage conclue, le stagiaire doit être inscrit au registre unique du personnel (art. L 1221-13 du Code du travail) avec la mention de la qualité de stagiaire. Les Institutions Représentatives du Personnel doivent être sollicitées à toutes les étapes de la période de stage et notamment pour veiller aux abus de l’entreprise dans le recours aux stages au lieu d’embauche de salariés jeunes diplômés. Le comité d’entreprise (CE) doit être informé et consulté tous les ans sur le nombre de stagiaires susceptibles d’être accueillis dans l’entreprise, les modalités de l’accueil, d’encadrement et de suivi prévues dans l’entreprise (dans le champ d’application de l’article L. 2323-38 du Code du travail). o En l’absence de CE, les délégués du personnel sont informés de la signature de conventions de stage, du nombre de stagiaires et de la durée des stages. o Les délégués syndicaux sont également informés du nombre de stagiaires susceptibles d’être accueillis dans l’entreprise, notamment par la communication des documents remis au comité d’entreprise. o Dans le cadre du bilan social pour les entreprises de plus de 300 salariés ou dans le cadre rapport annuel qui reprend l’ensemble des informations et des documents à caractère social, économique et financier pour les entreprises de moins de 300 salariés ; doit être indiqué le nombre de stagiaires, la durée de chaque stage, le service où le stagiaire est affecté, la rémunération versée et les tâches accomplies.
Pour FO, donner un statut aux stagiaires suppose obligatoirement une visibilité au sein des entreprises accueillantes. En conséquence, il est essentiel que les Institutions Représentatives du Personnel soient informées à toutes les étapes. En effet, une information encadrée et transparente permettra aux représentants du personnel de participer à la lutte contre les pratiques abusives au sein des entreprises.
Par ailleurs, la disposition issue du Décret du 31 janvier 2008 qui prévoit que « l’entreprise établit et tient à jour la liste des conventions de stage qu’elle a conclues » n’est pour nous ni nécessaire ni suffisante. Il apparaît évident que les entreprises établissaient déjà une liste des conventions de stage qu’elles avaient conclues.
Proposition 7 : Les mentions obligatoires de la convention de stage Le référent pédagogique et le responsable du stage La gratification du stagiaire La convention de stage doit fixer une gratification en rétribution du travail fourni par le stagiaire.
Proposition 8 : Les droits des stagiaires Le stagiaire doit bénéficier des dispositions du Code du travail relatives à la durée du travail, au repos quotidien et hebdomadaire, à l’hygiène, à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail. Tout dépassement de la durée légale de travail quotidienne ou hebdomadaire est interdit (toute heure supplémentaire), comme tout travail de nuit et tout travail dominical. Il doit bénéficier de la protection en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles. L’employeur doit procéder à la déclaration nécessaire en cas d’accident du travail. Il doit bénéficier des dispositions du Code du travail relatives aux congés pour évènements familiaux et aux congés de formation économique, sociale et syndicale.
Pour ce congé spécial, la durée du congé sera calculée au prorata de la présence du stagiaire dans l’entreprise. Pour exemple, en application de l’article L3142-7 du Code du travail, la durée du congé est de 12 jours par an et par salarié, ainsi pour un stagiaire qui effectuerait un stage dans l’entreprise pendant 3 mois, il pourrait bénéficier d’un congé de formation économique, sociale et syndicale de 3 jours. Pour les stages dont la durée est égale ou supérieure à 3 mois, la période de stage doit être prise en compte pour l’ouverture des droits à la retraite, permettant la validation de trimestres.
Le stagiaire peut s’adresser aux délégués syndicaux, aux délégués du personnel, aux membres du comité d’entreprise, aux membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour défendre le respect de ses droits et intérêts.
Proposition 9 : L’abus de stage
Est considéré comme un abus de stage, une convention de stage conclue en cas de remplacement d’un salarié absent, dont le contrat de travail est suspendu ou s’il a été licencié ; lorsque le stagiaire exécute une tâche régulière correspondant à un poste de travail ; en cas d’accroissement temporaire d’activité ; en cas d’occupation d’un emploi saisonnier. De même, un délai de carence d’un minimum de 3 mois doit être appliqué entre deux stages sur un même poste. L’abus de stage donne lieu à la requalification du stage en contrat de travail et au versement d’une indemnité qui ne peut être inférieure à 6 mois de rémunération à laquelle le stagiaire aurait pu prétendre s’il avait été en CDI (salaire minimum conventionnel). FO-Cadres 7 L’employeur peut également encourir des sanctions pénales, qui doivent être lourdes, pour chaque infraction constatée dans l’entreprise et punie plus sévèrement en cas de récidive. Malgré la vigilance des Institutions Représentatives du Personnel en matière d’abus de stage, il serait utile de prévoir un dispositif de quota de stagiaire qui doit être négocié dans les branches professionnelles ou les entreprises, en fonction de l’effectif de l’entreprise.
Proposition 10 : Le comité STAPRO, rôle et attributions
Le comité des stages (STAPRO) doit devenir le comité de suivi, de contrôle et d’intervention dans la lutte contre l’utilisation abusive des stages. Son rôle sera de veiller à la protection des droits des stagiaires et de participer à l’amélioration de la réglementation applicable. |